Témoignage Inondations…

Mercredi soir lorsque l’un des membres de notre comité nous a annoncé qu’il serait un peu en retard, sa fille étant victime d’une inondation dans son habitation suite aux fortes pluies qui s‘abattaient sur la région, nous étions loin d’imaginer ce que les prochaines heures nous réservaient.
C’est le lendemain au réveil que, pour la première fois, j’ai été confronté à l’implacable réalité.
Mon fils ainé m’appelait pour me demander de le rejoindre aux Minières dont il est l’un des administrateurs. La salle venait d’être ouverte en urgence à la demande de la ville de Verviers. Durant la nuit, la Vesdre s’étant transformée en une immense vague emportant tout sur son passage depuis Dolhain, il fallait accueillir les premiers sinistrés qui avaient tout perdu. Une notion encore un peu floue dans mon esprit.
Mais très vite, j’ai pris cette dure réalité en pleine figure avec un premier couple arrivant complètement trempé pour demander si nous n’avions pas des vêtements secs, car ils avaient tout perdu. L’eau était montée à près de deux mètres dans leur habituation qu’ils avaient quittée dans la précipitation ne pensant qu’à sauver… leur vie.
Tout s’est alors précipité, avec des appels en tous sens, les uns pour demander de l’aide, d’autres pour proposer des dons. Pendant ce temps, la cafeteria se remplissait de personnes aux regards perdus. Alors que les bénévoles se présentaient spontanément, les premiers dons envahissaient le hall d’entrée, les réseaux sociaux ayant déjà fait leur œuvre.
Je ne m’étais même pas rendu compte que ma boite de messages était remplie, mon téléphone étant sur vibreur. Parmi ces messages, celui d’un autre Kiwanien qui m’apprenait que le garage de son fils était ravagé.
L’incroyable s’était produit, sans que je m’en rende vraiment compte. Trop préoccupé à apporter une première aide à toutes ces familles qui arrivaient à la salle.
Très vite, il fallait prendre une décision. Le centre d’accueil resterait ouvert la nuit. La solidarité était en marche. Une chaîne de magasin allait nous fournir quarante lits de camp, la capacité maximale. Les bénévoles triaient déjà les dons avec les vêtements, les vivres et les premiers jouets pour les enfants qui courraient dans la salle sans vraiment comprendre ce qui se passait, tout à leur innocence. Les premiers repas étaient servis alors que les caisses ne cessaient de s’entasser dans une salle annexe, trop nombreuses pour pouvoir être ouvertes directement.
En quelques heures, un vaste réseau s’était mis en place, car les informations étaient de plus en plus alarmantes et parfois contradictoires, alors qu’on évoquait les premiers morts.
N’étant plus d’une grande utilité aux Minières, le plan de crise s’étant installé avec suffisamment de bénévoles pour aider au mieux tout à chacun, j’ai voulu rejoindre le garage de notre ami.
Arrivé devant la gare de Verviers, la vie se déroulait normalement, comme n’importe quelle journée de ce début de vacances. Tout ce que j’avais entendu, tout ce qu’on m’avait raconté, n’étaient-ils pas un peu exagérés ? La propagation de la rumeur n’avait-elle pas amplifié la réalité ?
Rien en effet ne laissait présager de l’horreur que j’allais découvrir deux cents mètres plus loin, au bas de la rue.
Sans transition, je découvrais l’apocalypse le long des berges de la Vesdre. Je ne reconnaissais plus ce coin de ma ville, une ville qu’il me fallait pourtant traverser et dont les rues étant jonchées de tout ce que les flots fous avaient charrié sur leur passage. Je suis enfin arrivé dans cette artère où la veille encore de nombreuses PME animaient le quartier.
Maintenant, ce n’était plus que désolation, voitures entassées, façades défigurées, alors que cela s’activait dans tous les sens. Après avoir parcouru les dernières centaines de mètres à pied, le passage en voiture n’étant tout simplement plus possible, je suis arrivé devant le garage où la boue avait tout envahi, à l’intérieur ce n’était que le chaos.
Tout le monde s’activait dans la pénombre, heureusement un groupe électrogène avait pu être mis en place pour procurer le courant nécessaire aux premiers travaux et tenter de sauver ce qui pouvait encore l’être. Il fallait aussi sécuriser les lieux pour la nuit, car on annonçait déjà le pillage de certains magasins. Impensable et pourtant vrai !
La nuit est alors arrivée, plongeant dans le noir ce quartier privé d’électricité, d’eau, de gaz. Comme toute une partie de la ville, la vallée de la Vesdre et d’autres cours d’eau en Wallonie.
Pour combien de temps encore ?
Personne ne pouvait le dire, mais pour l’heure, ce n’était pas encore le plus important.
La triste suite est connue…
Jean-Marc, Kiwanis Pays de Herve